Travailler plus pour gagner plus

Publié le 25 mai 2009 par Laurent

Cher tous,

En ligne depuis le 19 décembre, vous avez été 162 à répondre au « sondage du moment » qui avait pour question :

Comment envisagez-vous votre vie professionnelle ?

1. Gagner plus en travaillant plus – 97 votants
2. Gagner moins en travaillant moins – 65 votants

Sur les 155 participants, les résultats sont les suivants :

- 60% « Gagner plus en travaillant plus »
- 40% « Gagner moins en travaillant moins »

Sujet à controverse et à discussion, le « travailler plus pour gagner plus » fait débat dans notre société depuis quelque temps et a atteint son apogée lors de la dernière campagne présidentielle… A ce moment, les avis se sont opposés et celui du « travailler plus pour gagner plus » a remporté la manche. En effet, le peuple français a tranché et choisi à la suite de cette élection de construire une société sur ce modèle. Les résultats de ce sondage ne font donc que confirmer ce choix.

Avant d’ouvrir le débat et notamment pour étayer mon commentaire sur ce résultat, je vous propose un petit travail de réflexion autour de la notion de travail, qui navigue entre étymologie, philosophie et histoire...

Quelle est donc l’origine de ce mot travail ? Faisons un peu d’étymologie pour nous éclairer… Il semblerait que le mot travail ait pour origine un instrument de l’époque romaine : le tripalium, qui servait à torturer les esclaves. Est-ce à dire que le travail peut-être considéré comme une torture ou tout le moins comme une obligation ? Je vous laisse seul juge…

Pourquoi l’homme travaille-t-il ? Faisons alors un peu de philosophie pour répondre à cette question… Notamment au travers de deux grands penseurs que sont Aristote et Marx, pour le premier l’homme est privé de griffes et de fourrure, et doit compenser leur absence par des artifices. Il doit donc inventer des conduites, s’organiser autour d’outils et de moyens techniques… Ainsi le travail est apparu comme une nécessité «naturelle»: l'homme a du s'adapter en transformant la nature, pour combler ses besoins. Pour le second, l'homme transforme la nature et les choses par son travail, il façonne son environnement à son image et accède ainsi à la conscience : le travail est donc l’essence de l’homme et ouvre le chemin vers la culture et la liberté. Néanmoins, intervient la division du travail et la spécialisation des travailleurs, notamment avec la révolution industrielle : c’est le temps de l’aliénation, qui en substance se résume par : l'artisan produit en totalité un objet (il réalise et se réalise dans sa création), au contraire de l’ouvrier qui ne peut atteindre ce degré d’accomplissement. En effet, son travail n’est plus un aboutissement ou une création, mais une simple partie d’un tout… Le travail n’a alors d'autre but que de fournir un salaire grâce auquel les besoins du travailleur seront satisfaits. L’homme ne se réalise plus et ne se libère plus par son travail, il en devient esclave et n’a qu’une hâte s’en défaire… Il s’engage alors dans une fuite en avant que j’analyse par le besoin de consommer toujours plus pour se réaliser et surtout oublier son aliénation.

Quel temps pour le travail ? Faisons place à un peu d’histoire pour y répondre… Alors qu’il semble que l’ouvrier du Moyen Age commence et finit son travail avec le jour. La journée était donc parfois plus courte, parfois plus longue selon la saison que la journée du XIXe et XXe siècle, notamment rythmée par les cadences et les horaires fixes. A l’année, ce même ouvrier fournit un nombre de journées et d'heures de travail plutôt inférieur à celui que l'on exige de l'ouvrier du XIXe et XXe siècle. En effet, l’organisation de la société au Moyen Age fait la part belle aux obligations de l’Eglise et aux très nombreux jours chômés, fériés, fêtés et célébrés que la dévotion de dieu ordonne à cette époque !

Il est donc avéré que si certains travailleurs du Moyen Age travaillaient largement moins que nous le faisons aujourd’hui… De même, la moindre activité de la production à cette époque, l'absence de toute spéculation, la régularité de la demande permettaient de prévoir la quantité et la nature des objets qui devait être fabriqué sans être obligé d'imposer au travailleur des efforts extraordinaires, qui prend aujourd’hui toute sa force dans la notion de productivité. Certains travailleurs travaillaient donc moins longtemps, mais aussi l’activité devait être mieux équilibrée, moins nerveuse, ils devaient être moins surmenés, plus appliqués et plus consciencieux. Il semble donc bien que se soit l’industrialisation de nos sociétés et l’avidité des consommateurs qui nous poussent vers le « travailler plus pour gagner plus ».

Pourquoi la France s’est-elle orientée vers le partage du Temps de Travail ? Malgré cette marche en avant vers le toujours plus, la France a connu au XXe siècle une réglementation forte du travail avec deux phénomènes fort de sens : les congés payés et la réglementation sur la durée légale du temps de travail. L’aboutissement en étant la loi sur les 35 heures et notamment l’avènement du concept de partage du travail. L’objectif de cette théorie économique étant d’augmenter le nombre de travailleurs par le partage du travail afin de diminuer le chômage. Cette politique s'accompagne, d'une façon ou d'une autre, d'une baisse de rémunération individuelle (pour le salarié) et d'une hausse du coup de la main d'œuvre (pour l'employeur). L’échec est réel, les conclusions de la plupart des économistes sur la politique de partage du travail vont dans le même sens : la réduction du temps de travail ne crée pas d'emploi et bride l’activité économique. La notion du « travailler plus pour gagner plus » est donc au début de ce XXIe siècle de nouveau remise sur le devant de la scène et permettra à son porte drapeau de s’en servir pour notamment se faire élire à la présidence…

Quel avenir pour le « travailler plus » ? Simple manœuvre électoraliste morte-née, car rattraper par une urgence, celle de la décroissance… En effet, le « travailler plus » implique une croissance économique plus soutenue et durable. Néanmoins, la raréfaction des ressources naturelles ne semble pas nous autoriser à nous engager sur une telle voie sans compter les dommages sur l'environnement, le climat et les écosystèmes… Une croissance soutenu d’un type Trente Glorieuses, ce que sous-entend la notion du « travailler plus » ne ferait que nous précipiter plus rapidement vers un futur plus qu’incertain.

Vous comprendrez aisément que j’ai quelques difficultés à concevoir et comprendre l’intérêt « du travailler plus pour gagner plus », car que faire de cet argent en plus si l’on a moins de temps pour en profiter : s’enrichir ? Consommer plus ? Alors même que nous sommes à la croisée des chemins et que la solution bien que difficile de la décroissance semble la plus sage et la plus profitable à l’humanité sur le long terme…

Afin d’élargir le débat sur « le travailler plus », je ne lie pas forcément argent et travail, mais plus travail est plaisir… En effet, et je l’espère (en tout cas dans nos sociétés occidentales), le travail correspond de plus en plus à la vocation d'un individu et à ses tendances les plus profondes (création artistique, philosophique, scientifique…), celui s’approchant plus du jeu, de l’épanouissement et de la recherche de liberté… Internet pouvant en être un formidable outil, notamment dans le développement de la libre entreprise et le développement d’une forme d’artisanat numérique.

Certainement chanceux, j’ai l’opportunité de faire un travail plaisant, ressourçant et motivant. Alors que j’ai conscience que beaucoup de personnes (en tout cas trop à mon goût) ont une activité professionnelle qui n’est pas en phase avec leurs motivations et envies. Elles trouvent alors satisfaction dans un travail parce que celui-ci leur permet de se réaliser dans la consommation et de correspondre au dictat de nos sociétés matérialistes. Est-ce à dire que ce besoin de « travailler plus pour gagner plus » est l’expression d’un malaise et d’une sorte de fuite en avant de notre société ? Le besoin de trouver un véritable intérêt à son travail, notamment par le « gagner plus » ? Alors qu’il me semble que le travail se doit d’être avant tout un moyen pour se développer, évoluer, apprendre, communiquer et mettre en musique ce qui nous fait ce que nous sommes… C’est à dire des animaux sociaux qui s’épanouissent dans la rencontre, les échanges et la recherche de liberté.

Dans l’attente de vos avis et commentaires sur ces propos, je vous propose de participer à un nouveau sondage :

Dans la perspective d’une recherche d’emploi, quel canal de recrutement vous parait le plus efficace ?

- Les relations personnelles et professionnelles
- Les cabinets de recrutement
- Le réseau de votre école
- Les petites annonces sur des sites spécialisés
- Les candidatures spontanées
- Les petites annonces des organismes pour l'emploi
- Les espaces recrutement sur les sites des entreprises

Merci d'avance de votre participation au nouveau sondage du moment.