Interview de Marie Guyot, community manager/responsable éditoriale

Interview de Marie Guyot, community manager/responsable éditoriale

A la recherche d'un poste dans le community management et proposant ainsi ses compétences, Marie Guyot nous donne sa vision de ce métier et des enjeux (e-réputation, real-time web et stratégie). Elle partage aussi avec nous son expérience chez Culturofil et Semiocast.


Bonjour Marie, peux-tu te présenter en quelques mots ?


Marie Guyot : Bonjour ! J'ai une double casquette Editorial/Gestion de contenu d'un côté, et e-Réputation/Community management de l'autre.

Je suis présente sur le Web depuis 2002, grâce à des articles publiés sur des sites spécialisés dans le cinéma, mais aussi via des sites que j'ai moi-même créés, comme notamment Culturofil, qui a dû fermer ses portes fin décembre après presque 5 ans de présence en ligne et une croissance constante.

Et bien sûr je suis passionnée par les réseaux sociaux et leurs usages, ainsi que par les nouvelles technologies !



Tu es également interessée par les challenges de l'identité numérique et l'e-réputation. En arrivant sur MarieGuyot.fr, on a toutes tes présences en ligne. Comment t'organises-tu ? Quels contenus peut-on retrouver sur chacune des plateformes ?


MG : Oui ce sont des sujets qui m'intéressent beaucoup et mon site personnel est depuis longtemps un « portail » vers mes différentes présences en ligne.

Pour résumer, je suis présente sur LinkedIn et Viadeo pour des raisons strictement professionnelles (présentation de mon CV, développement de mon réseau pro, participation à des hubs spécialisés dans les domaines en lien avec mes centres d'intérêt pro), et sur Facebook pour des raisons personnelles, comme prendre des nouvelles de proches que je ne vois pas très souvent.

J'ai choisi de laisser publiques toutes mes photos sur Flickr, même si elles sont personnelles (ce sont souvent des photos de voyages ou d'instants qui m'ont interpelée).

Pour Twitter (@Marie_Guyot) c'est un peu particulier. Je suis multi-tâches mais me dédoubler ce n'est pas dans ma nature. Du coup j'ai choisi de n'avoir qu'un seul compte, pour des raisons pratiques d'une part, mais aussi parce qu'il me semble important de rester soi-même.
Une bonne partie de mes posts est donc professionnelle, mais je publie aussi des liens qui ne sont pas directement, ou pas du tout, liés à mon travail.
Cela peut par exemple être une info qui m'a marquée, une galerie photos qui me plaît particulièrement…
D'une manière générale je ne retweete pas systématiquement les liens que je vois passer : je prends toujours le temps de lire les articles avant de les tweeter à mon tour, car je trouve primordial de savoir exactement quelle info on partage avec son réseau, et bien souvent je ne fais suivre que ce qui me semble ne pas avoir déjà été dit 100 fois et ce que je trouve particulièrement intéressant (et ce qui me fait rire, mais ça c'est une autre histoire).


Quels sont tes conseils pour les personnes souhaitant s'appuyer sur le web social et gagner en visibilité professionnelle ?


MG : Je crois que si l'on souhaite se rendre plus visible, le Web social est effectivement nécessaire aujourd'hui. Mais je voudrais tout de même rappeler en passant que le virtuel n'est pas auto-suffisant et qu'il est important de rencontrer ses contacts en « vrai », pour consolider les liens, construire sur la durée.
Ceci étant dit, il ne s'agit pas d'être sur les réseaux sociaux simplement pour y être. Comme je l'ai dit plus haut il est important de rester soi-même, ne serait-ce que pour présenter une image virtuelle cohérente avec l'image réelle qu'un recruteur découvrira en entretien.
Il faut donc choisir le (ou les) réseau le plus approprié à son projet et à sa personnalité. Par exemple basiquement, LinkedIn est orienté international alors que Viadeo a une étiquette nationale. Une identité numérique se gère au quotidien, il est donc nécessaire de choisir un outil avec lequel on sera à l'aise.
Une fois le terrain choisi, il faut penser « vitrine », en créant une présentation de son parcours et de ses compétences, et « contenu », en choisissant les groupes de discussion qui nous intéressent. Et se poser les bonnes questions : sur quel créneau, quelle thématique est-ce que je me positionne; qu'est-ce que j'ai à apporter à la communauté que je souhaite rejoindre; quelles compétences me rendent unique, différent; quels sont les champs sur lesquels je souhaite en priorité apprendre des autres, etc. Autant d'interrogations qui définiront ensuite la façon dont on interviendra sur ces groupes de discussion et, par conséquent, la façon dont on sera perçu par nos pairs et les recruteurs potentiels. Je citerais l'adage qui dit qu'il faut donner pour recevoir, mais j'ajouterais qu'un peu d'humilité ne fait jamais de mal : si vous démarrez en pensant que vous avez des tas de choses à apprendre au monde, vous partez du mauvais pied.
Enfin il me semble que la question n'est pas de savoir s'il est bon de mélanger vies professionnelle et personnelle ou non, mais plutôt de savoir ce que l'on est prêt à rendre public. Nous ne sommes pas des robots, nous sommes aussi faits d'émotions et de moments que nous avons besoin de partager. Reste à savoir ce dont nous sommes prêts à discuter à la machine à café. Certains garderont pour eux qu'ils sont fans de tricot, d'autres assumeront totalement leurs soirées du samedi. Je pense qu'il est vain de se dire « je vais cacher cela car ça risque de me nuire », car ce qui est nuisible est après tout assez subjectif et dépend donc de chaque interlocuteur. Pour résumer, je dirais soyez vous-mêmes, mais gardez tout de même en tête qu'il faut tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de parler.


On parle de plus en plus de community management, pour toi quelles seraient les qualités de la personne en charge du développement de communautés ? Admettons que l'on parte de zéro, quelles seraient les étapes essentielles pour attirer des membres et les fidéliser ?


MG : Je crois que l'empathie et l'écoute sont des qualités primordiales pour un community manager. Il faut être capable de se « brancher » sur sa communauté pour comprendre ses besoins et donc être en position de répondre à ses attentes. Aimer le web, c'est une évidence.

Connaître les réseaux sociaux (savoir par exemple quels types de profils sont présents sur quelles plates-formes) sera aussi une compétence nécessaire, notamment si le community manager participe à la définition de la stratégie de son entreprise.
Pour fédérer une communauté en partant de zéro, il faut avant tout définir une stratégie de présence sur le web : identifier les besoins de son entreprise et les buts à atteindre, et bien sûr prendre en compte sa cible, pour établir sur quels canaux il sera nécessaire d'être présent, et définir la ligne éditoriale et le contenu pour chacun de ces canaux.
Par exemple, commencer par ouvrir une page Facebook sans se poser de questions c'est risquer d'aller droit dans le mur : vos clients sont-ils réellement sur Facebook, pourquoi une page et non un groupe, ce dispositif répond-t-il à vos plans communication et marketing, etc.
Ces questions servent à remettre en cause l'ouverture systématique d'une page Facebook, mais bien sûr ce dont il s'agit c'est surtout de se poser ce type de questions en amont de toute action.
Ensuite, pour faire court, il faut être en veille permanente sur sa marque et sur les thématiques associées, et bien sûr il faut répondre aux commentaires, surtout lorsqu'ils sont négatifs : entendre ce qui ne va pas est le seul moyen de s'améliorer et d'améliorer ses produits.


Tu as des expériences voisines chez Culturofil et SemioCast. Quelles en ont été tes activités et tes tâches ?

MG : À Culturofil j'avais de multiples casquettes puisque j'ai notamment créé le site, animé l'équipe interne, et développé les partenariats et les relations avec les attachés de presse. En terme de community management, il s'agissait avant tout de gérer la communauté des lecteurs, de répondre à leurs demandes faites, entre autres, par le biais de commentaires sur le site, et d'inciter les rédacteurs à répondre aux messages qui leur étaient directement adressés.
Comme il s'agissait d'un magazine sur lequel étaient publiées des critiques culturelles, donc subjectives, j'ai aussi parfois été amenée à gérer quelques crises.
Pour développer la visibilité du magazine j'ai ensuite défini une stratégie de présence sur les réseaux sociaux (Twitter, Facebook et LinkedIn), et il a s'agit alors d'animer ces différents dispositifs : les faire vivre et les développer, mais aussi y favoriser les interactions.
Interview de Marie Guyot, community manager/responsable éditoriale
Chez Semiocast/Titema il était plutôt question de e-Réputation & de perception plutôt que de développement de communauté. Après un audit de la présence de la marque sur le web, je leur ai proposé quelques recommandations pour communiquer au mieux en ligne, optimiser l'utilisation de leurs différents flux, définir leur image et clarifier leur discours.


Que penses-tu du web en temps réel ? Comment les entreprises peuvent-elles s'appuyer dessus ?


MG : C'est le symbole de la mutation de notre utilisation d'Internet. D'une bibliothèque géante, source d'informations extraordinaire, nous sommes passés à un web conversationnel où tout le monde peut interagir avec tout le monde.
Il me semble que c'est une erreur de croire que ne pas être présent sur le web empêchera ses clients de dire du mal de sa marque ou de ses produits. C'est faire l'autruche. Au contraire être présent sur le web c'est l'occasion de fédérer le discours de ses clients, donc de pouvoir non seulement y répondre, montrer qu'on est à l'écoute, mais aussi de réagir s'il y a une crise, d'améliorer ses produits etc.
Le web temps réel est donc une formidable opportunité de veille & de réponse pour les entreprises.
C'est aussi un défi en terme de visibilité, car son revers est le bruit généré par toutes ces interactions. Pour autant il me semble que ce n'est pas celui qui criera le plus fort qui se fera le mieux entendre, mais plutôt celui qui composera la plus jolie chanson.


2009 a été marqué par une adoption encore plus importante des médias sociaux et les études eMarketer montrent bien que les responsables marketing tendent à intégrer les médias sociaux dans les stratégies marketing. Justement, comment s'appuyer sur ces places sociales pour gagner de nouveaux clients et de nouveaux partenaires ?


MG : Nespresso par exemple est pour une moi une des marques qui s'en sort bien, mais le résultat obtenu n'est pas un hasard. Ils s'appuient au départ sur un produit novateur, une machine à espresso fonctionnant à l'aide de dosettes, et sur ce qui deviendra le socle de leur communauté, le club Nespresso.
Le tout s'adressant à une cible bien définie, orientée luxe (design des machines, coût de revient d'une tasse, cadre des boutiques, choix de George Clooney comme égérie…), et nous voici face à une image de marque extrêmement forte.


Interview de Marie Guyot, community manager/responsable éditoriale
Ensuite, la communication autour de la marque a été pensée sur des dispositifs multicanaux qui ne sont pas redondants : page Facebook, compte Twitter, chaîne YouTube, sites Internet et films publicitaires « classiques » se complètent et se répondent. Les internautes ont par exemple récemment pu voter pour choisir la fin de la dernière publicité mettant en scène John Malkovitch aux côtés de George Clooney.
Cette stratégie de présence sur les réseaux sociaux doit être complétée par une écoute constante de ses clients et de leurs besoins. Cela me paraît nécessaire afin d'être capable de leur répondre au mieux, notamment en cas de problème. Par exemple, si la crise qu'a récemment rencontré H&M sur Facebook est désormais globalement masquée par des messages plus récents, elle a été assez représentative d'une mauvaise appréhension de sa communauté. La marque n'a pas su anticiper l'importance que sa réponse pouvait avoir pour la communauté, ce qui a fait durer la crise plus longtemps qu'elle ne l'aurait dû.
Les réseaux sociaux sont des outils de diffusion et de communication, comme le sont une campagne d'affichage, un spot tv ou un site corporate.

« Quels sont les outils qui serviront le mieux ma stratégie de développement » est à mon sens la question qu'il faut se poser
avant de se demander « comment Twitter peut rendre ma marque plus visible ». Ce sont les réseaux sociaux qui doivent être des outils au service de nos stratégies, et non l'inverse.