A l’heure où le débat sur les salaires des grands patrons a été relancé, quelque uns dans le paysage politique, mais aussi dans l’opinion publique se sont tournés vers les autres professions où les salaires sont importants. Le cinéma et Le sport.
L’argument populaire qui consiste à dire que ces gens sont trop payés a t’il un sens ?
Dans le monde du cinéma, les cachets comme on les appelle (ce ne sont pas des salaires) peuvent être extrêmement importants quand la star a une aura importante. Mais ce cachet dépend uniquement de si l’acteur a effectué un tournage dans l’année.
L’exemple qui me vient à l’esprit est celui de François Berléand, qui déclarait avoir touché 150 000 Euros l’année dernière pour sa prestation dans « Maurice Le Siffleur ». Si on rationne cela à l’année, on arrive sur du 12 500 par mois. Un salaire confortable. Bien sûr certains en haut de l’affiche en France arrivent à 1 million, mais on est loin des cachets des stars américaines à plus de 20 millions. Cependant, ces chiffres résultent de prestations fournies par un acteur pour un spectacle qui peut en rapporter plus. Ce cachet est déduit d’un budget prévisionnel et il est fixé en avance. Evidemment, les primes, si le film marche bien, peuvent être importantes (Cf Bienvenue chez les Ch’tis).
Hormis le monde du spectacle, le monde du sport est aussi pointé évidemment du doigt et surtout son sport numéro 1 : Le football.
Un salaire dans le football c’est quoi ?
Les footballeurs sont payés comme tous les salariés, au mois. Leur salaire annuel est fixé lors de la signature d’un contrat et il a une limite dans le temps (tout cela pour dire que les footeux ou sportif signent en fait des CDD !). Salaire fixe auquel s’ajoutent des probables primes de matchs fixées par un barème propre à chaque club. Comme dans le monde de l’entreprise, elle est fixée par rapport au comportement de l’équipe, et au comportement du joueur. Les revenus du footballeur peuvent être aussi augmentés grâce à des revenus dits extra sportifs, tels que les contrats publicitaires ou autres activités externes (montage de société d’événementiel ou gestion d’un établissement).
Question chiffres, la moyenne de la ligue 1 est, d’après la prévision des budgets, de 41.000 euros brut mensuels pour la saison 09/10, contre 45.000 euros pour la saison 08/09. Cette différence entre les deux saisons s’explique par une diminution du nombre de contrats pros en Ligue 1 et non pas par une raison liée à la crise.
On paye pour un spectacle
L’argument du foot-spectacle a été utilisé à des fins purement communicatives de la part du monde du sport et plus précisément celui du foot. Pour faire passer une certaine idée que le football est un spectacle avant tout (ce qui est vrai sur certaines rencontres), on a mis en avant que les footballeurs, au même titre que des artistes, amènent du monde dans les stades, comme un acteur remplirait les salles de cinéma grâce à sa seule présence dans un film. Il est donc évident que ce salaire est justifié. Un nom important dans le monde du foot a un salaire important. Mais alors quid du niveau de jeu de l’intéressé ?
On raille souvent les joueurs par rapport à leur inefficacité par rapport au jeu. Un buteur qui ne marque pas souvent se voit conspuer. Se défendant par rapport à un état de fatigue sur le moment, on lui rétorque à tort ou à raison « vu ce que tu es payé ».
Les salaires par rapport au mérite
Cela n’existe pas dans le football, ni même plus tellement dans le monde du travail. Si on fait un parallèle intéressant, les salaires dans le privé augmentent de façon globale et très rarement au mérite. Une promotion signifie pour un employé une récompense individuelle due à son travail personnel (et on parle de 5% maximum). Un gap salarial se fait en général lorsque que l’on décide de changer d’employeur (et là on peut parler de 10% voire plus). Un footballeur c’est pratiquement la même chose.
L'Eldorado pour tous les joueurs du monde.
Les contrats sont établis sur une durée déterminée dans le temps par rapport à un salaire connu d’avance, une augmentation signifie de facto un nouveau contrat pour une nouvelle durée. On commence à voir dans le football des contrats avec objectifs (ce qui est très rare encore), qui promettent alors une augmentation sustentielle du salaire de base (hors primes) sur la durée du contrat si les objectifs personnels du joueur sont atteints (nombre de buts, ou bien pour certains par rapport à la notation médiatique).
Un joueur de football se distingue par rapport à sa cote ou sa valeur. Il est évident que plus important elle est, plus son salaire le sera. Bien sûr, Son « CV » est important dans la négociation, mais c’est sur sa performance la plus récente qu’il sera payé et non pas sur son parcours.
Les salaires sont proportionnels aux revenus des clubs
Oui, évidemment, les clubs versent (en théorie) ce qu’ils budgètent aux joueurs en essayant de se restreindre à une part des rentrées financières espérées dans l’année. Un club riche paie des gros salaires à ses joueurs. Alors bien sûr ceux-ci se calculent sur ce que peut apporter une équipe, en termes de résultat bien sûr, mais aussi en termes d’image, et on rentre donc dans un aspect de merchandising. Les rentrées financières de l’ensemble des clubs de L1 ont été doublées en 10 ans et quadruplées en 20 ans. Se basant sur le budget de l’OM, on avait en 89 : 140 millions de francs soit 25 M€, 350 Millions en 99 (48 M€) et à peu près 100 Millions d’euros en 2009. Rentrées d’argent s’expliquant par plusieurs variables bien connues. L’augmentation des droits TV (680 millions en 2009), des entrées au stade (fois deux par rapport à 89) et par rapport aux sponsoring plus importants. Les salaires dépendant de ces rentrées subissent une inflation logique. Pour autant, au vu des résultats financiers de l’ensemble des clubs français (en déficit pour la plupart en 2009), on peut se poser la question sur ces montants là. Clair que si on ne maîtrise pas le budget, c'est que l’on a trop dépensé (en Angleterre on parle de 10 milliards d'euros de déficit cumulé pour l’ensemble des clubs pros). Dire que les clubs ont trop dépensé : OUI. Mais de là à dire que les salaires sont trop hauts...
Adéquation, spectacle fourni et prix à payer
BARCELONA a tout gagné en 2009, mais le BARCA a l'une des plus grosses masses salariale d'Europe.
Bien évidemment, dans le football, l’argent est un critère important. Plus on a d’argent plus on a le plaisir de voir évoluer des grands noms devant soi. Pour autant, est-on assuré du spectacle ? C’est moins sûr, et on rentre dans le débat sur la merveilleuse loi du sport, où l’on peut voir de temps en temps le petit battre le gros. Rien n’est garanti pour un club d’avoir les meilleurs sur le terrain, malgré les sommes engagées. Idem pour une société, ce n’est pas parce qu'on a recruté et que l’on a mis le prix qu’on aura les meilleurs résultats (bien que la probabilité de les atteindre est plus importante).
«On en veut pour son argent ».
Ah, la rhétorique de spectateur qui paye souvent assez cher son billet et qui se plaint du spectacle... A grosse équipe = Gros Budget = Prix des places élevés >> SPECTACLE OBLIGATOIRE.
Problème de mentalité
Typiquement Franco-Français, ce débat, mais très peu mis en avant à l’étranger. On ne parle pas en France de salaire comme on en parle aux US. Bien qu’aux USA, où les salaires des sportifs sont élevés, on attend d’eux un effort supplémentaire. Depuis la montée du sport pro en France, on a cette sorte de jalousie qui nous caractérise sur les revenus de nos sportifs. Notre culture nous pousse à récompenser les actions qui viennent de l’intellect plutôt que celles liées au physique.
LUCHO peine à convaincre...
L’argumentation du spectacle est piétinée par le fait que les footballeurs ne sont pas pour nous français des gens de culture. Réduits à des « mecs courant après un ballon », la notion d’artiste appliquée à certaines stars par les médias ne prend pas chez nous. Et pourtant c’est le cas en Espagne, où un MESSI ou un RONALDO sont des artistes que l’on vient voir jouer. La méconnaissance du football en France est criante à ce sujet. Mais pour autant, on ne peut nous jeter la pierre d’être un poil plus réalistes que nos voisins « fanatiques » de leur club.
Mais notre particularité, c’est que l’on juge aussi facilement des performances d’un joueur par rapport à son salaire. Le cas le plus flagrant est celui de LUCHO à l’OM. Arrivé avec une grosse réputation, et donc un gros salaire, le joueur ne donne pas entière satisfaction. « Il n’a pas fait ses preuves ». Soit ! Cependant et comme tout employé, il y a une période d’adaptation. La durée de celle ci peut par contre engendrer un mécontentement très acerbe si le salaire de la star est élevé.
Et il y a aussi depuis 15 ans l’âge du joueur qui rentre en cause. Nos jeunes footballeurs gagnent des sommes très importantes de plus en plus tôt. Là où l’âge et l’expérience étaient des critères à une époque pas si lointaine, aujourd’hui, on se base plus sur des spéculations sur la valeur future d’un joueur et non sur son expérience globale. Il est prometteur, donc on le paie cher pour ne pas le laisser filer ailleurs.
Trop payé ?
Oui, si on prend un critère purement sociologique. On accepte mal que notre voisin, parce que peut-être plus doué, gagne des fortunes grâce à un talent. On ne prend en compte que ce qu’il donne réellement en retour. Pour les footballeurs, seul le critère sportif rentre en compte.
Non, si on prend en compte l’état du marché de ce sport et les revenus que le football engendre. Malgré une dérégulation provoquant une probable crise dans ce monde d’ici 2 ans due à l’aggravation des déficits d’exploitation des clubs (anglais, espagnols, français), les salaires culmineront au plus haut.