Mon conseil à Mickaël : mesurer le professionnalisme du recruteur pour analyser son entretien

Publié le 17 août 2010 par Laurent

Cher Mickaël,

Suite à un entretien déstabilisant, vous m’interrogez par mail :

« Ce matin j'ai fait un entretien (d'une série de 3 dans la même entreprise) avec le DG.J'ai été très déconcerté car il ne m'a presque pas regardé, avait l'air dans la lune, et a fait des silences prolongés en simulant qu'il lisait mon CV. J'ai fait ce que j'ai pu pour transformer ces silences en moment adéquats pour poser une question, mais ce fut un entretien très désagréable, alors que les 2 premiers s'étaient très bien passés. L'entretien a duré 15/20 minutes. je trouve cela très court ! et on m'a juste demandé mes prétentions salariales. »

« Ma question est : ce genre d'attitude est-elle une technique d'entretien? Ou dénote-t-elle un réel rejet envers un candidat? Le fait qu'un recruteur ne me regarde pas, c'est extrêmement gênant et limite poli… Je suis déconcerté et j'ai un goût amer dans la bouche. »
Premier concept à comprendre : point de règles établies dans l’univers impitoyable du recrutement. Notamment quand celui-ci est pratiqué par des non professionnels, ce qui malheureusement arrive encore bien souvent. Chacun allant de sa méthode, de sa technique ou tout simplement de ses envies…. Quand le recrutement est pratiqué par des professionnels, il existe des grands principes qui vous permettront de faire le tri entre le bon grain et l'ivraie... Je vous propose d'en découvrir quatre :
1) Seul en entretien point de salut
Votre aventure avec ce DG ne m'étonne guère, un des principes à respecter en matière de recrutement : ne jamais laisser un opérationnel seul en entretien, et cela même de sa hauteur de DG. C'est à dire non accompagné par un professionnel du recrutement ou un membre de la grande famille RH... Le recrutement est un métier qui ne s'improvise pas !
L'attitude que vous avez rencontrée n'est donc pas une technique d'entretien, ni un rejet, ni de l'impolitesse... Vous vous êtes retrouvé face à un DG qui n'était certainement pas à l'aise dans l'exercice du recrutement n'en étant pas un professionnel.
2) A plus de deux, le tribunal fait son oeuvre

Autre situation délicate pour le candidat se retrouver en face de trois interlocuteurs et parfois plus ! Je vous l'assure, ceci existe notamment dans la fonction publique ou il s'agit de passer des oraux face à un jury. Mais aussi dans la fonction territoriale, il m'est arrivé (dans mon ancienne vie de Consultant j'avais développé une clientèle notamment auprès de collectivités locales) d'assister à ce type d'entretien avec Monsieur Le Marie, le Directeur des Services Généraux, son adjoint, le DRH et moi-même... Et nous voilà en plein tribunal, ne manque plus qu'au spectacle, les robes, perruques et le marteau du juge... Rien de tel pour stresser le candidat, ne pas le mettre à l'aise et ne pas obtenir d'informations qualitatives de sa part !

3) A l'aise et en confiance pour libérer la parole

Elément essentiel : l'ambiance et le cadre de l'entretien, un recruteur professionnel se doit de mettre à l'aise le candidat, mêlant accueil et convivialité pour que ce dernier soit en confiance, se livre naturellement et sans effort au recruteur... Stresser un candidat, le présurer, le titiller, lui mettre la pression ne sert à rien, notamment en début d'entretien. Savoir écouter et détendre le candidat permet au recruteur d'obtenir des informations justes et de découvrir avec aisance sa personnalité, ses comportements au travail et ses motivations... Bien évidemment, il faut savoir mettre en place un « effet crescendo » dans l'entretien et faire monter la pression au fur et à mesure de l'entretien. Cette pression étant différente suivant les postes et leurs caractéristiques. Le recruteur ne mettant pas en place le même « effet crescendo » selon qu'il évalue un commercial ou un comptable.

4) Trop d'entretien use le candidat

Un processus de recrutement se doit d'être court pour le candidat... Ne pas multiplier les entretiens permet de prendre une décision rapide. Plus les entretiens sont nombreux, plus les avis seront divergeants et plus la décision prendra du temps. Le meilleur des processus me paraît donc être un: – premier entretien avec le futur n+1 et un recruteur professionnel, n'est-il pas motivant pour le candidat de rencontrer directement son futur manager ? – second entretien avec le n+2 et son futur Responsable RH.

Ce processus est court pour le candidat et débriefer autour de quatre avis permet de prendre une décision rapide.

Pour conclure votre entretien ne s'est donc pas mal passé... Il a été simplement mal organisé et réalisé par une personne dont la compétence première n'est pas le recrutement, mais d'assurer la responsabilité d'une Direction Générale. Il aurait mieux fallu accompagner ce D.G. d'un R.H. ou le former à l'entretien de recrutement ! Bien souvent les candidats sont surpris du contenu et de l'ambiance des entretiens de recrutement, car sont ceux-ci ne sont pas réalisés par des professionnels...
Charge au candidat de déterminer le professionnalisme de son interlocuteur et à l’apprenti recruteur de se présenter comme tel auprès des candidats pour enlever toute ambiguïté ! L'analyse de l'entretien par le candidat n'en sera que meilleure et évitera tout quiproquo.

Espérant avoir répondu à vos questions.

Au plaisir d'échanger avec vous sur ce thème.