Marque employeur : l’effet jus de raisin

Publié le 27 avril 2012 par Thierry Delorme @Thierry_Delorme

A la toute fin des années 80, les plus anciens s’en souviennent peut être encore,  la collective du jus de raisin lançait une grande campagne de communication et accaparait nos écrans et nos esprits avec une rengaine et des paroles qui réunissaient tous les éléments pour devenir culte :

“Aller très tôt au boulot, décider qu'il fait beau… C’est très jus de raisin !

Etre super actif, voir la vie en positif… C’est très jus de raisin ! ».

Avec quelques années de recul et une analyse peu complaisante des paroles, je m’interroge : quel rapport peut-il bien y avoir entre l’insomnie ou un rendez-vous matinal pour « décider d’aller très tôt au boulot » et le jus de raisin ? Le jus de raisin aurait-il par ailleurs des pouvoirs insoupçonnés sur les masses d’air et les changements climatiques pour, comme ça, « décider qu'il fait beau » ? Certes, il est possible que le rapport soit plus direct lorsqu'ils’agit de « voir la vie en positif », sous condition toutefois que le jus de raisin soit fermenté, confié à un maître de chais et ingurgité en quantité suffisante…ce qui fait tout de même quelques conditions, mais soit.

De ces rapports improbables entre effet et cause est donc née une nouvelle théorie, toute personnelle mais promise je l’espère, à un avenir radieux : "l’effet jus de raisin."

Et la marque employeur me semble en êtreune parfaite illustration. Car tout comme le jus de raisin, la marque employeur est parée de nombreuses vertus : tour à tour ADN (certes unique mais figée), interne, externe, globale, locale, particulière, générale, attractive, attirante, top, great, fidèle, réelle, authentique, transparente, collaborative, conversationnelle, 2.0 (oups, j’allais l’oublier... et j’en oublie sûrement d’autres)… Et est censée produire de nombreux effets secondaires : l'attractivité de l’employeur, le recrutement des meilleurs talents, la fidélisation des collaborateurs et leur engagement comme ambassadeurs, sans parler de la responsabilité sociale qu'elle doit incarner et porter. Cela fait tout de même beaucoup pour une seule marque, toute employeur soit elle...

Car je pense, peut-être naïvement, que ce sont les innovations, les politiques, les projets audacieux et les réussites d’entreprises en matière RH qui créeront les belles « marques employeur » et non l’inverse. De la cause et de l’effet, de l’effet jus de raisin… La communication, seule, ne peut créer. Elle traduit, accompagne et place en visibilité des offres auprès de publics cibles. Et la communication RH, visant à déployer une "marque employeur", n'est pas le seul apanage des grands groupes. Il convient de refuser la fatalité selon laquelle les employeurs attractifs sont soit membres du CAC 40, soit les leaders de secteurs d'activités qui continuent de faire rêver nos bataillons de jeunes générations, à savoir l'aéronautique, le luxe, les cosmétiques, le conseil ou les nouvelles technologies !

Il y a de la place pour innover en termes RH sur de nombreux terrains, au-delà des obligations (ou contraintes) légales : inter-génération, diversité, égalité professionnelle, recrutement, handicap …  Et l'attractivité n'est pas, loin s'en faut, la seule composante de la personnalité ou de l'identité d'un employeur. Enfin, le terrain du fond compte désormais de nouveaux alliés avec les médias sociaux sur lesquels le fond, justement, comte tout autant que la forme.

Et pour en finir avec l'effet jus de raisin, et malgré cette formidable campagne de communication que je vous invite à (re) visionner ci-dessous, je ne bois toujours pas de jus de raisin...