Il était une fois le "Recrutement Responsable"

Publié le 04 juin 2013 par Annepestel @AnnePestel

Aujourd’hui, je souhaiterai vous faire partager une de mes lectures intitulée : "Le recrutement responsable" écrit par Thomas Vilcot, Directeur du Recrutement au sein du Groupe Casino et Président du CFA Forma Sup Ain Rhône Loire – accompagné de nombreux témoignages de grandes renommées.

Il était une fois le "Recrutement Responsable"…

L’idée d’écrire sur la thématique du "Recrutement Responsable" est née d’une histoire entre un père et une fille. Rappelez-vous quand vous étiez jeune, que vous demandiez à votre papa "Dis papa, c’est quoi ton métier ?", ou bien quand les maîtresses demandaient de dessiner le travail de ce dernier. Sauf que quand on est Recruteur, cela peut poser quelques problèmes. Initialement ce livre aurait dû s’intituler : "Dessine-moi un recruteur". Puis de façon naturelle, le titre de "Recrutement Responsable" vint s’imposer, admettant ainsi de placer l’ensemble des processus et moyens de recrutement sur un terrain innovateur et différenciant.

Qu’est-ce que "Recruter autrement" ?

Recruter autrement débute par proportionner les moyens et outils à l’objectif recherché.
Recruter autrement c’est également instaurer un certain dialogue avec le candidat et jouer sur la proximité pour rendre davantage accessible l’entreprise. Il est essentiel de détenir une approche favorisant la durée de la relation, ainsi qu’un esprit d’anticipation des besoins et l’accès aux candidats passifs – comme nous le suggère Valérie Fenaux-Duval, Directrice des Services aux Entreprises à l’APEC.

Recruter autrement, c’est consentir au droit à l’erreur et accepter une marge d’incertitude, se perchant aux antipodes des sciences exactes. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, tendre vers la nullité du risque, se résume en définitive à une tentative porteuse d’un risque considérable. Clonage et lissage de profil, vision à court terme, en sont les malheureuses conséquences. Même si l’intention est bonne, il est nécessaire de comprendre que la perfection n’existe pas et que le fameux "candidat parfait" dont tout le monde parle a des faiblesses, parce qu’il est tout simplement de nature humaine. C’est ici que rentre en jeu les recruteurs qui endossent un rôle de "Risk Manager", consentant au droit à l’erreur, permettant ainsi de dédramatiser l’atmosphère actuelle.

Mais dans cette démarche attrait à la prise de risque et à l’innovation, la critique sera facile et l’impact plus important étant donné du 2.0 désormais… Cependant il me semble que l’unique moyen de manquer à la critique est de ne rien faire, un peu du même goût que le proverbe "Qui ne tente rien a rien", vous voyez ?

Le Recrutement dans l’ère de l’humanisation

Le recruteur joue un rôle-clé dans la performance durable de son entreprise en agissant sur l’élément clé de la réussite : les Femmes et les Hommes qui la constituent. Selon la dernière édition du Rapport SHL, 56% des professionnels des ressources humaines considèrent désormais que "l’engagement et la fidélisation des collaborateurs sont des priorités".

Aujourd’hui, recruter c’est un pari : celui d’une reconstruction massive. Le marché de compétences dégradées que nous connaissons aujourd’hui porte en lui deux changements majeurs : la diversité et le passage de l’éternelle logique des diplômes (très français !), limitatrice et sclérosée, à celle des compétences, accessibles et dynamiques.

Dans cette société complexe, chacun et chacune se retrouvent autour de valeurs communes. S’ouvrir à des compétences comportementales transférables est un projet ambitieux dans lequel il faut croire : il est l’aboutissement d’une posture où l’individu est évalué sur ce qu’il est et les compétences qu’il possède plus que sur ce qu’il n’a pas ou n’a pas fait.

Mais la performance du recrutement responsable repose également sur la confiance que les responsables de ce dernier entretiennent avec l’ensemble de leurs parties prenantes (interne et externe). On parle de plus en plus des RH comme des "Business Partners", mais il serait davantage question de "Business Contributor" comme le souligne Thomas Vilcot. Le premier étant trop au large des enjeux opérationnels, le second plus au cœur des activités.

Les faiblesses du recrutement

Le recrutement est partout, on n’a jamais autant parlé d’emploi. Ce constat peut paraître rassurant pour les recruteurs, le problème étant que le nombre d’acteurs liés à cette thématique ne cesse d’augmenter… Conclusion : manque de clarté du marché et une concurrence féroce.

Selon Eric Le Jaouen, Président du Medef Loire, Dirigeant du Groupe Ginkgo – Conseil en Ressources Humaines, le recrutement n’est pas suffisamment pris au sérieux face à l’impact que cette thématique a sur le développement de l’entreprise. Une erreur de recrutement par exemple, peut dégrader le climat social, porter atteinte à l’image de l’entreprise, même parfois causer la perte de clients.

Ce qui demeure étonnant, en partant du constat que l’avenir se joue sur les bases du recrutement, c’est que cette thématique soit confiée à de jeunes individus (ayant moins de 30 ans pour la plupart). Or comment ces interlocuteurs à l’expérience et aux pratiques limitées, peuvent-ils être à même d’évaluer un candidat potentiel pour des métiers spécifiques par exemple ? Et j’en passe. De même, adopter une logique de sous-traitance complète s’avère inconcevable mais bien réelle – malheureusement.

Dans l’absolu, quand on y pense, tout le monde peut être Recruteur. En 2012, les cursus diplômants spécifiques en matière de recrutement restent difficiles à énoncer. Qui sait, peut-être qu’un jour, on imaginera un cursus de formation dédié vraiment certifiant, ou bien encore une démarche de labellisation… Affaire à suivre.

Le recrutement, sa vision et ses best practices, doivent obligatoirement être pilotés et inspirés par le sommet managérial de l’entreprise, pour ainsi donner du sens. Il est évident que le rôle des RH dans l’élaboration et la diffusion de cette thématique ne peuvent être qu’une simple option, mais davantage une obligation. Mais sans l’appui des hauteurs hiérarchiques, j’ai bien peur que notre recrutement responsable reste cloué au sol, accroché par une théorie vampirique.

Pénurie et Guerre des Talents, entre malaise et challenge

Aujourd’hui la réalité de notre marché de l’emploi se veut d’être pessimiste, face à une véritable pénurie de candidats qualifiés et mobiles. On estime à 600 000 le nombre de postes qui ne trouvent pas preneur, faute de candidats. Les DRH deviendraient-ils des "Directeurs de la Rareté Humaine" ?

A noter qu’au commencement de la rareté et de la pénurie, il existe une certaine inadéquation qui prend racine dans l’inadaptation de la formation initiale – à noter que la formation continue ne la compense malheureusement que partiellement et de manière imparfaite. L’Apec et le Pôle Emploi n’hésite pas à souligner cette difficulté à faire se rencontrer l’offre et la demande, soit la formation des candidats et les nécessités du marché de l’emploi. Aujourd’hui près de 55% des recruteurs rencontrent des difficultés à trouver des profils adaptés aux exigences et besoins de l’entreprise.

Recruter aujourd’hui, c’est en définitive se trouver confronté globalement à une pénurie de mobilité et de compétences utiles. De nouveaux métiers ont vu le jour, et d’autres connaissent une pénurie monstre, faute d’attractivité ou par pure méconnaissance – ou bien encore, parce que les postes à pourvoir ne correspondent pas pleinement à la disponibilité géographique des candidats.

Le bouleversement du recrutement avec l’arrivée des nouvelles Générations

Selon Marie-Jeanne Huguet, Coach de Dirigeants et Spécialiste de la Cohésion Intergénérationnelle d’équipes, le recrutement se doit d’intégrer une nouvelle donne : l’arrivée de candidats (Génération Y et Z), porteurs de nouveaux comportements, de modes de pensée et d’actions brutalement différents. Afin d’attirer et d’approcher ces nouveaux candidats, il faut assimiler cette logique : "L’outil principal du recruteur, c’est le recruteur lui-même". En d’autres termes, c’est la personnalité du recruteur (et de l’entreprise) et la philosophie exposées qui feront la différence. Plus que toutes autres générations, le premier contact est fondamental pour ces jeunes. La Génération Y est également plus sensible que ces prédécesseurs, au Recrutement Responsable, synonyme de plus "économiquement durable" ou bien encore de "plus solidaire".

La sphère digitale étant en plein essor et la tendance des jeunes générations à être hyper-connectées, ne rendent donc plus négociable la présence des dirigeants et RH sur les réseaux sociaux. D’ailleurs les recruteurs commencent à assimiler cette démarche en farfouillant sur Facebook (29%), sur LinkedIn (21%), ou bien encore sur la blogosphère (11%). Malheureusement, et comme nous le souligne, Pascale Solona, Directrice régionale du Journal de l’Emploi Rhône-Alpes (Groupe SIE), ce nouveau mode de recrutement porte davantage préjudice aux candidats. En effet, 35% des employeurs affirment que ce qu’ils trouvent dans cette sphère pousse à la non-embauche du candidat – et seulement 18% disent le contraire… Encore du boulot à faire du côté des deux parties prenantes !

Mais malgré les divers facteurs alléchants de ces nouvelles technologies, il ne faut pas oublier que le recrutement est d’abord une aventure humaine…. Ces évolutions doivent servir l’acte de recrutement et non l’asservir en le dénaturant. Il convient pour cela de garder intact l’esprit humaniste qui doit inspirer le recruteur : écoute, ouverture, tolérance, mais aussi exigence et conseil.

Au final, la relation candidat-recruteur a profondément changé. Elle se joue dans une dimension locale, elle accorde une grande place à la proximité, elle a aussi acquis une dimension partenariale. Elle accorde une plus grande part à la diversité, aux compétences, dans un environnement législatif contraignant. Elle se tisse également dès les premières années, dans une relation tuteur-apprenti / stage, à tous niveaux de qualification.

Bienvenue dans l’ère du recrutement 3.0 : le recrutement relationnel

Avec les nouvelles mutations technologiques, le chargé de recrutement se transforme en Manager Animateur de Communauté et de e-réseau, de viviers de talents. Ses trois armes : connectivité, agilité et contrôle. Pour le recruteur 3.0, recruter de manière responsable, c’est piloter et investir avec responsabilité, dans des directions innovantes, pertinentes, mais toujours réfléchies. Quitte à bousculer un marché de la communication RH parfois beaucoup trop concentré et sclérosé. En d’autres termes, il s’agit de s’appuyer sur trois piliers qui sont la transparence, la modernité et l’accessibilité.

Mais cette tendance à la digitalisation du recrutement ne date pas d’hier. Certain évangéliste, tel que Laurent Joseph, Fondateur de Compagnons de Cordée déclarait déjà haut et fort que le Web allait devenir un outil incontournable au recrutement. Internet a bousculé le modèle économique des acteurs traditionnels, comme par exemple les candidats devenus "candidacteurs", se voyant proposer de nombreux points d’accès à une information de plus en plus vivante et partagée.

Mais nos recruteurs sont à la traîne et ne sont pas forcément aidés de manière objective dans leurs choix d’investissement du Web. Par contre les candidats, eux, ont mis le pied sur la pédale d’accélérateur !

Cependant, Benjamin Chaminade, Fondateur de Trendemic.net, nous rappelle que cette démarche digitale ne doit être basée sur des motivations financières ni même sur un principe « d’être à la mode ». C’est d’abord et surtout un moyen supplémentaire pour se différencier de ses concurrents en améliorant la relation avec ses candidats, pour faire face à une pénurie de talents qui contre toute attente semble s’aggraver.

Conclusion – Cet article n’est qu’une légère synthèse, avec une touche de critiques, de ce que ce livre riche en expériences peut vous apporter. Je vous invite donc à le lire au plus vite !

Au passage, j’aimerai remercier Laurent Joseph pour m’avoir offert ce livre, lors de nos chers apéros RH sur Paris !