Avec plus de 36 000 lectures et plus de 1 000 commentaires, la discussion Viadeo initiée au début de l’été 2012 et intitulée « Recruteurs cherchent candidats......désespérément !!! » est certainement, aujourd’hui encore, la plus populaire des médias sociaux professionnels sur le sujet recrutement (et sans doute au-delà).
Le pitch ? Le paradoxe du marché de l’emploi avec un chômage qui progresse de façon interrompue (depuis
deux ans maintenant avec un triste record de 3,2 millions de chômeurs en mars dernier) et des recruteurs qui constatent majoritairement (pour 80 % d’entre eux) leur difficulté à recruter. Et le
sujet de discussion ? Le nécessaire renouvellement des pratiques du recrutement avec un appel vibrant au changement (plutôt à la mode à cette même période de juin 2012, le changement…pas le
recrutement
Cet appel s’inscrit parfaitement dans la lignée des débats RH qui se multiplient avec la montée en puissance de nouveaux espaces de dialogue(ou de diffusion, c’est selon) sur les médias sociaux. Et la discussion reste toujours d’actualité.
Acte 1 : Morituri te salutant 1
Les premières cibles de cette quête du renouveau furent les outils du recrutement. Haro sur le e-recrutement et les jobboards, modèles dominants de l’ancien temps (comprendre pas 2.0). Il est à noter que le fait de décrier un jobboard n’est pas incompatible avec le fait de glorifier un site internet avec des annonces de recrutement dedans (il n’est pas incompatible non plus de les décrier mais de les utiliser abondamment). La différence est plus subtile qu’il n’y parait...
Seconde victime sur la liste des nécessaires boucs émissaires : le CV. Cet outil standardisé est-il devenu inutile ? La faute à Microsoft Word (si, si, je l’ai vu écrit) ? ; ou aux plus de 200 ouvrages de modèles de CV prêt-à-l-emploi-qui-que-vous-soyez-et-quel-que-soit-l-emploi-auquel-vous-postulez (prêt à l’emploi, c’est un comble...) ? ; ou aux innombrables recettes de cuisine, trucs et astuces qui encombrent la toile ?
Bon, les outils, c’est réglé. Ca ne change rien mais c’est fait ! (C’est curieux cette manie de penser qu’un outil peut résoudre un problème et que, de facto, un problème peut disparaitre avec un outil…).
Acte 2 : Moderatio in omnibus 2
Au tour des process (et à ceux qui les mettent en œuvre, donc) de subir la vindicte. Plus compliqué à challenger que des outils… Et pour y aller en douceur, la voie de la dématérialisation s’impose : bienvenue dans le v-recrutement, le recrutement virtuel.
Pas si révolutionnaire que ça, le v-recrutement. En 2007, des opérations et salons virtuels de recrutements voyaient le jour sur Second Life avec des retombées fortes en termes de communication (inversement proportionnelles à l’efficacité du recrutement, d’ailleurs). Et cette formule virtuelle existe encore avec, par exemple, les e-days ou tout récemment, Handi2day.
Le CV est dépassé ? Creusons le sillon et supprimons l’entretien, l’évaluation telle qu’elle se pratique aujourd’hui,… Supprimons tout ! (Pour la suppression des recrutements eux-mêmes, le recours à l’outil crise est conseillé…).
Mais rien n’y fait et l’incompréhension recruteurs/candidats perdure. A ce sujet, je vous conseille la lecture du billet intitulé "Pourquoi le recrutement ne devrait plus exister ?" qui challenge lui aussi le recrutement. Pas les outils, mais bien la refondation du monde professionnel et du rapport à l’emploi avec une réflexion qui repose surtout sur la prise en compte de l’ensemble des acteurs de la "tragédie", candidats inclus.
Dernier acte : Post mortem 3
Les candidats, objets de toutes les attentions et de tous les conseils, sont souvent les grands oubliés de l’écosystème recrutement à challenger.
Bon, je sais. Ce n’est pas très populaire de dire du mal des candidats dont de très nombreux nombreux sont en réelle détresse et bien loin des sujets développés ici...
Mais de temps en temps, avouez... Il me semble que quelques changements seraient salutaires : s’intéresser à l’entreprise qui recrute, au contenu du poste proposé, ne pas considérer qu’un niveau d’études (aussi élevé soit-il) constitue une garantie de compétences ou de droit à l'emploi, savoir à qui l’on s’adresse (Ah, vous n’êtes pas l’entreprise truc, je ne me souviens plus bien, j’ai envoyé tant de CV…)… Autant de petits détails qui, mis bout-à-bout peuvent aussi attirer l'attention d'un recruteur sans harcelement 2.0 intensif...
Le recrutement est mort ? Alors vive le recrutement ! Et le 2.0 n'y changera rien.
Traductions libres : 1 - "Un Mojito et j'y vais" / 2 - "Silence dans les transports !" / 3 - "Mon CV est resté lettre morte..." / Traductions recommandées : 1 - "Ceux qui vont mourir te saluent" / 2 - "De la mesure en toute chose" / 3 - "Après la mort"