Cher lecteurs voici enfin la suite promise, en m’excusant du retard pris dans la production de ce deuxième épisode…
4. A travers le téléphone : premières micro stratégies d’auto motivation
« Allô Docteur A. ? Bonjour, je suis Y., je travaille dans un cabinet de recrutement et je vous appelle pour vous proposer un poste dans votre spécialité.
(…)
Allô Docteur Z ? Je suis Y. du cabinet de recrutement B., êtes vous à l’écoute de nouvelles opportunités professionnelles ?
(…)
Bonjour, puis-je parler au Docteur C. ? De la part de Y. Il s’agit d’un sujet personnel, qui concerne le Dr C. en personne, c’est confidentiel.
(…)
Oui bonjour Docteur D., je suis Y. du cabinet de recrutement &, est- ce le bon moment pour parler avec vous maintenant ? (…) Je vous appelle pour faire le point avec vous, voir où vous en êtes au niveau professionnel et si l’on peut vous proposer des postes en lien avec vos desiderata.»
Ces phrases de première approche avec les candidats sont devenues un refrain que je débite quotidiennement à travers un téléphone, l’arme fatale n°1 du chasseur de têtes.
Au tout début je ne me lassais pas de les répéter car une conviction profonde m’animait : j’offrais aux candidats une nouvelle opportunité, une nouvelle voie, un choix de carrière, la possibilité de changer de ville, changer d’environnement, changer de collègues et tout recommencer à zéro. Pendant les quelques minutes où j’avais le candidat au bout du fil je m’intéressais réellement à lui et, parfois, lorsqu’il s’agissait d’un candidat que nous avions déjà dans nos fichiers, on faisait un petit bilan ensemble avant de lui proposer un poste. Lorsque l’opportunité que je proposais au candidat pouvait coïncider avec ses desiderata, avec un objectif ou un projet de vie, cela me rendait heureuse. Dans le cas contraire, qui était le plus fréquent, lorsqu’un candidat me disait qu’il était déjà bien dans son poste, je l’en félicitait et me réjouissais pour lui. Si un candidat était intéressé pour changer de job mais n’était pas séduit par mon offre de poste, je l’interrogeais alors sur ses desiderata, je notais cela dans mon « tableau de chasse », je l’en remerciait pour m’en avoir fait part et lui assurait de le recontacter le jour où nous recevions une offre en adéquation avec ses souhaits. Tout cela peut avoir un côté un peu naïf et utopique mais c’est en ayant cet état d’esprit là que je pouvais, sans lassitude, passer plusieurs dizaines de coups de fil par jour et ne me pas me sentir dépitée ou frustrée ou démoralisée par plusieurs dizaines de « non, merci je ne suis pas intéressé. » En réalité mon attitude et ma perception de mon activité découlaient d’une stratégie qui me permettait de voir les choses en beau et pouvoir ainsi continuer mon boulot sans que cela me soit pénible. Cette stratégie consistait à transformer dans mon esprit le commercial en relationnel.
En outre, cela me semblait en lien avec ce que je croyais qu’on attendait de moi… Car lors de l’entretien d’embauche, on m’avait signifiée que la qualité principale d’un chargé de recherche est la capacité d’écoute. C’est pourquoi, bien que consciente de la part commerciale de la chasse, je pensais que le relationnel primait sur le commercial ou que je pouvais transformer le commercial en relationnel.
Or je me rendis rapidement compte que même si un commercial doit avoir des compétences relationnelles (« la tchatche ») l’équation relationnel- commercial est impossible.
Aussi mes superviseurs m’ont rapidement fait comprendre que l’écoute avec un candidat n’avait qu’un seul but : détecter si celui-ci possède bien les minima requis pour le poste (diplôme+expérience) et si le job l’intéresse. Dans le cas contraire il faut couper court, poliment mais promptement, à la conversation.
C’est ainsi que la représentation initiale que je me faisais de mon activité s’effondra et je dus inventer d’autres stratégies pour continuer à travailler sans morosité. C’est à peu prés à cette époque que je commençais à attendre avec impatience la fin de mes journées, les week-ends et rêver de vacances au soleil ainsi que de paysages paradisiaques pendant que je parcourais les souterrains de ma ville à l’entrée ou à la sortie d’un métro.
Au plaisir de lire vos réactions et commentaires…