La génération Y vit au rythme d’Internet, des Smartphones et de la culture du zapping. Quelles sont les conséquences possibles sur la formation professionnelle ?
En 2008, le célèbre éditorialiste Nicolas Carr publiait un article qui allait faire le tour du monde: « Is Google making us stupid? ». Il analysait l’impact d’Internet sur notre capacité de concentration et le développement d’une certaine forme de culture du zapping.
L’article abordait les points suivants:
- Le Web nous permet de cliquer de lien en lien, avec une facilité et une rapidité déconcertantes.
- Cette hyper accessibilité de l’information entraine le problème de son tri et tend à effacer le distinction entre information et connaissance.
- Le Web attaque notre capacité de concentration sur un seul objet pendant une durée soutenue et nous transforme en zappeurs invétérés.
Quelles conséquences pour le monde de la formation?
L’irruption du Web, au travail comme dans la vie privée, a un impact direct sur nos manières d’apprendre et donc d’enseigner. Pourquoi apprendre par cœur des lois, des dates ou des formules quand on peut les « googleliser » en un clin d’œil ? Pourquoi écouter un formateur pendant une journée si tout est accessible en vidéo? Comment stimuler la concentration d’un cerveau hyper stimulé et dispersé ? Cette nouvelle donne impacte profondément le monde de la formation. Trois facteurs principaux expliquent cette évolution.
Tout d’abord, dans un contexte de crise, les entreprises cherchent à rationaliser leurs achats. Deuxièmement, le rapport du salarié à la formation a évolué : ceux-ci sont plus en plus impliqués dans leurs formations et commencent à s’auto-former si l’offre de leur entreprise ne correspond pas à leurs besoins en termes de contenu et de plan de carrière. On n’envoie plus des salariés en formation, on la choisit avec eux. On achète moins sur catalogue, mais de plus en plus en fonction de ses besoins stratégiques.
De nombreux acteurs du marché s’inquiètent de ces nouveaux usages et de leur potentiel impact sur un marché très concurrentiel et plus aussi rentable. Les formations présentielles dispensées en une ou deux journées sont-elles pour autant vouées à disparaître? Sont-elles vraiment dépassées ou le buzz autour des Moocs et des innovations du monde de la formation n’est-il justement qu’un buzz ? L’intégration de la culture numérique dans la formation professionnelle a d’ores et déjà commencé.
Se réapproprier la formation au gré des nouveaux moyens technologiques
Le marché de la formation a commencé adopter des techniques issues du web et du webmarketing pour rester pertinent. Prenons l’exemple des Mooc. Le taux de complétion, c’est-à-dire le rapport entre le nombre d’inscrits et le nombre de participants final, se situe en moyenne entre 5% et 15%. L’enjeu réside donc dans la capacité à retenir les étudiants, à les amener au bout du parcours pédagogique. Un peu comme un site e-commerce qui souhaiterait optimiser son taux de conversion et faire en sorte que plus d’internautes arrivent sur la page panier, la formation commence petit à petit à adopter ces mécanismes issus du Web: acquisition, transformation, fidélisation.
C’est le point de vue de Nicolas Hernandez, CEO de 360 Learning, une société éditant un LMS reposant sur la qualité du design et des interactions sociales entre formateur et apprenants: « Les formateurs et les participants cherchent de plus en plus de flexibilité, de souplesse, de personnalisation. Le multimédia est également une donnée centrale présente: varier les formats, les adapter selon les besoins et toujours, stimuler la concentration pour réduire le décrochage. »
Le Smartphone: au centre de la formation nouvelle génération
Autre impact du numérique dans la formation : l’usage du mobile. Se former devient une action quotidienne, permettant de tirer parti de temps morts (dans les transports en commun, entre deux rendez-vous par exemple).
A terme, le temps de la formation ne sera plus forcément circonscrit à la journée de formation achetée par l’entreprise, mais se prolongera en-dehors, via des applications, des vidéos, des quizz etc… Les jeunes qui utilisent déjà leur Smartphone pour toutes les tâches du quotidien contribueront à imposer cet usage à leur arrivée dans la vie active.
Dernier aspect qui révolutionne la formation : le social learning et l’apprentissage communautaire. Le web permet de faire appel à des communautés d’expertise pour co-créer, valider et diffuser du contenu. Wikipédia est l’exemple le plus parlant de l’usage du crowdsourcing dans l’éducation.
Le marché ronronnant de la formation professionnelle est donc amené à intégrer toutes ces innovations d’usage; si les déclinistes du secteur sont encore loin de voir leurs prévisions voir le jour, il est clair que la révolution du numérique déplace les attentes et contraint les acteurs institutionnels à évoluer.