La pataphysique est une parodie de philosophie qui explore ce qui est au-delà de la métaphysique. Elle se définit (Alfred Jarry) comme une « science des solutions imaginaires ». Elle cherche en particulier à faire triompher le principe de plaisir sur celui de réalité par exemple autour de l’usage des trois objets essentiels que sont la bicyclette, le revolver et l’absinthe.
Mais pourquoi vouloir aller au delà de la métaphysique ? Aristote a clarifié avec sa métaphysique les notions par lesquelles les gens comprennent le monde qui les entoure. Il décompose la réalité d’une part, entre son objectivité qui est indépendante du sujet qui la regarde et d’autre part, sa subjectivité qui est dépendante de la relation qui unit la réalité au sujet qui la regarde. La physique étudie le monde de la matière réelle et la métaphysique le monde des formes imaginaires.
Je devrais plutôt écrire « le monde des formes imaginées » car la forme n’est pas une propriété intrinsèque de la matière mais est donnée par l’intelligence d’un sujet libre. Notre cerveau, en effet, cherche constamment un moyen d’utiliser, d’instrumentaliser, les objets qu’il perçoit. Nous avons ensuite, en principe, le libre arbitre de passer à l’action ou non selon que l’objet soit une bicyclette, un revolver (danger !) ou de l’absinthe. Aristote nous fait comprendre que la perception unifiée que nous avons du monde résulte d’une synthèse personnelle, réalisée par notre cerveau, entre l’existence d’objets réels et la finalité que nous leur attribuons librement sous la forme d’un usage possible.
Si nous voulons vivre en communauté nous devons partager la finalité des usages que nous faisons des objets qui nous entourent. Pas évident quand le point de départ est l’ensemble des perceptions que chacun se fait du monde et qui sont par nature toutes différentes, voire parfois contradictoires ! Aristote nous propose d’abord de nous mettre d’accord sur la physique en étant capable de distinguer la matière réelle et les formes imaginées. Ensuite, par le dialogue dans la communauté, nous pouvons échanger et partager les formes imaginées pour bâtir des finalités communes pour le bien de tous. Aristote nous dit : « la discussion au sein de la cité est en soi le début de la richesse » et il n’avait pas Internet !
A l’inverse, l’enfermement sur soi rend le risque des finalités que nous donnons à nos usages non mesurable par l’autre et donc nous conduit à le nier. Un pataphysicien avec une bicyclette cela va, avec un verre d’absinthe cela passe mais avec un revolver cela commence à devenir vraiment dangereux ! Enfin, beaucoup moins qu’une bande de financiers avec des CDO (Collateralized Debt Obligation) …