Etre libre sans être seul : le modèle de la coopérative
Comment conserver sa liberté au travail sans tomber dans l’excès inverse de l’instabilité subie ? Différents modèles d’entreprise tentent de réaliser la quadrature du cercle. Le portage salarial, explicité dans des précédents articles, et tout au long de ce blog, en est un bon exemple. Mais s’il s’adresse principalement aux métiers du consulting et de la formation en général et si la relation entre salarié porté et société de portage se concrétise surtout au travers des missions réalisées par le salarié porté, un autre modèle partage le même objectif de liberté de ses salariés tout en le déclinant différemment dans la pratique : la coopérative de travail. S’adressant à tous profils manuels et intellectuels, elle exige cependant un lien plus fort avec ses salariés, au travers de la mutualisation des responsabilités et des moyens.
Focus sur le modèle de la coopérative de travail
Se lancer dans l’aventure entrepreneuriale tout en évitant la paperasse et en bénéficiant de la sécurité d’un CDI, c’est presque trop beau pour être vrai. Et pourtant, plus de 7000 entrepreneurs ont fait ce choix en France et ce chiffre est en progression. Réunissant des professionnels de secteurs d’activité divers et variés comme l’art et l’artisanat d’art, les services aux particuliers, les services aux entreprises, le bâtiment ou encore le commerce et le négoce, les coopératives de travail vous offrent les avantages de l’indépendance tout en vous protégeant contre ses risques.
Plus précisément, contre une partie de son chiffre d’affaires, l’entrepreneur bénéficie :
– d’un cadre juridique (numéro de TVA et immatriculation au Registre du commerce et des sociétés)
– du statut d’entrepreneur – salarié en CDI, et donc d’une protection sociale
– d’une gestion administrative (comptabilité, calcul et versement des salaires, obligations fiscales, sociales et comptables)
– du réseau des autres entrepreneurs de la coopérative
– d’informations sur les enjeux de santé – sécurité dans le cadre de son activité
– d’un conseil pour le développement de son business
Et pour se convaincre du bien-fondé de l’idée, écoutons un convaincu : Sandrino Graceffa, le directeur général de la SMart. Cette entreprise de mutualisation de services artistiques – concerts, cours, expositions et autres actions de sensibilisation – est présente dans 9 pays en Europe et va devenir coopérative de travail le 28 juin prochain. Pour lui, la coopérative est un cadre qui permet « d’être à la fois entrepreneur, c’est-à-dire copropriétaire de l’entreprise, et en même temps travailleur salarié, et donc protégé par les droits liés au salariat. »
L’exemple de Coopaname
Contre 10% de votre chiffre d’affaires, Coopaname a l’ambition de former « un cadre collectif où chercher ensemble les moyens de vivre décemment de ce qu’on aime et sait faire au rythme qui nous convient. » Depuis 2004, la coopérative francilienne regroupe plus de 750 professionnels d’horizons divers : photographes, collectif de secrétaire, coachs, philosophes sur le mode de l’artisanat, du free lance et de la prestation de service.
Ce qui saute aux yeux chez les coopanamiens et coopanamiennes, c’est leur forte identité politique et démocratique. Une identité assumée non seulement dans le discours mais aussi dans les pratiques.
En guise d’exemple, on ne peut qu’être interpellé par le positionnement anti-entreprenariat individuel de la coopérative qui y voit une équation mortifère : « micro-entreprise + micro-crédit = micro-revenu + micro-protection sociale » pour reprendre la formule de Stéphane Veyer, ancien DG de Coopaname.
Autre illustration parlante, la vitalité démocratique de l’organisation. Avec un conseil d’administration élu par tous les associés de Coopaname, des séminaires trois fois par an, des réunions mensuelles, des universités de saison, et bien d’autres occasions encore, la coopérative multiplie les possibilités d’échange sous le signe de l’égalité des participants, de leur collaboration et de la richesse de leur faire-ensemble.
Une formule de « mutualité de travail » tentante, qui s’éloigne autant du lien de subordination traditionnel entre un employeur et son employé que de l’idée d’une autonomie radicale de l’entrepreneur, vécue comme danger de précarité, notamment pour les métiers manuels visés. Le travail chez Coopaname est avant tout envisagé comme un lien social, une indépendance mais dans l’inclusion.
Finalement, qu’il s’agisse de portage salarial ou de coopérative de travail, les deux formes de coopération sont similaires, et finalement plus sœurs qu’ennemies. Et pour cause, toutes deux apportent une bonne réponse à une même aspiration forte dans le monde du travail contemporain : l’autonomie.
Références
http://www.entreprises.coop/decouvrir-les-cooperatives/chiffres-cles.html
http://www.lesoir.be/1222491/article/economie/rdv-ceo/2016-05-27/sandrino-graceffa-smart-forme-cooperative-est-l-evidence-pour-smart
https://www.afecreation.fr/pid14974/cooperative-d-activite-et-d-emploi-cae.html
http://www.talents-opale.fr/concept/faq/integrer-societe-cooperative-activites-entrepreneurs
http://www.lenouveleconomiste.fr/lesdossiers/portage-salarial-et-cae-le-statut-et-lesprit-26853/