L’entreprise libérée, une révolution pour les travailleurs?
L’entreprise libérée est un concept né au début des années 2010 sous l’impulsion du professeur Isaac Getz. Il part du concept qu’à l’heure actuelle les salariés sont répartis en trois catégories : les salariés « engagés » qui sont heureux dans leur travail et investis dans leurs tâches (11%), les « salariés désengagés » qui remplissent les tâches qu’on leur assigne et attendent de partir (61%), les « salariés activement désengagés » (28%) tellement désabusés qu’ils viennent au travail pour démontrer leur malheur. Ainsi 89% des travailleurs de nos entreprises seraient malheureux, démotivés et donc contre-productifs. Selon lui, ses maux seraient dus à l’organisation classique des entreprises qui ne laisse aucune place à la créativité et étouffe le salarié de devoirs.
Le concept de l’entreprise libérée est, partant de là, très simple. Il s’agit de laisser les employés s’organiser, les rendre responsables et satisfaire leurs besoins fondamentaux (égalité intrinsèque, développement personnel & autodirection). Un journaliste des Echos parle d’entreprise « pourquoi » parce que la manière d’y arriver compte plus que le but. Ainsi, ses théoriciens sont convaincus qu’en laissant les salariés plus de marge et de capacité de décision, ils vont donner le meilleur et innover davantage. Mais ce n’est pas pour autant l’anarchie, comme l’une des contreparties est l’auto-discipline.
En plus d’un accroissement de l’innovation, cela permet une réduction de coûts due à la suppression de la hiérarchie et la réduction des fonctions supports (RH, contrôle de gestion…). En résumé, l’entreprise libérée, c’est ça.
Toutefois, ce mode d’organisation rencontre aussi des oppositions. Ainsi, des spécialistes comme François Geuze critiquent l’organisation à plusieurs égards. Tout d’abord, elle n’aurait pas de gagnants et les cadres seraient injustement accusés de mettre en péril l’entreprise en opprimant leurs subalternes. De plus, les entreprises libérées ne seraient pas moins touchées par les burn-out, car la pression sociale y serait très forte. Enfin, sous couvert d’une belle philosophie humaniste, les dirigeants seraient guidés par des motifs financiers au détriment des salariés qui vont s’investir plus pour gagner la même chose. Le spécialiste n’hésite pas à paraphraser La Boétie, parlant de servitude volontaire pour décrire ce concept…
Alors, l’entreprise libérée est-elle la solution pour donner aux travailleurs de demain le lifestyle qu’ils souhaitent ? Peut-être verrons-nous des Chief Hapiness Officer sévir dans tous nos bureaux dans quelques années…