Diversité et monde de la tech
En apparence progressiste et libéral, le milieu de la tech souffre d’un manque criant de diversité. Il semblerait que cette industrie soit tombée dans les méandres de la reproduction sociale. Plusieurs rapports mettent en exergue les problématiques des entreprises de la Silicon Valley en la matière, qui commencent à s’emparer de ce sujet par souci de performance : « la diversité est devenue la tendance de fond dans le recrutement des entreprises de la Tech. La raison majeure est que, depuis des années, des études très sérieuses, émanant notamment des prestigieuses Harvard et Stanford Business School, démontrent que la diversité cognitive des équipes augmente significativement la performance de ces dernières sur des sujets complexes » rappelle Frédéric Téhard (Vice-Président dans le cabinet de recrutement Robert Walters California).
En France, le constat est le même avec, pour problématique prioritaire, la diversité sociale. Et pour cause, l’étiquette « grande école » reste un facteur clé pour réussir dans ce milieu.
En mars 2017, Christophe Sirugue (secrétaire d’Etat chargé de l’Industrie, du Numérique et de l’Innovation) a lancé le programme French Tech Diversité dont l’objectif est de promouvoir la diversité sociale dans l’écosystème des startups : « La French Tech est socialement très homogène. Elle fait peu de place à la diversité qui, en France comme ailleurs, est le terreau de l’innovation ». Le programme qui accueille 35 startups depuis juin 2017 s’adresse aux résidants de quartiers défavorisés, aux étudiants boursiers et aux bénéficiaires des minima sociaux. Salima Maloufi Talhi, directrice du programme, attribue ce manque de diversité à l’herméticité de cet écosystème. L’univers de la tech est (paradoxalement) difficile d’accès pour certaines populations, car le succès repose, pour beaucoup, sur le réseau. « Si on ne fait rien, le système se reproduit naturellement ». De plus, l’incertitude et la précarité de ce milieu peuvent représenter un frein important pour les personnes qui ne disposent pas d’autres sources de revenus.
Moussa Camara, président de l’association Les déterminés et lui-même entrepreneur, précise qu’outre le réseau, l’état d’esprit est un élément discriminant dans l’univers de la tech : « On ne veut pas vendre du rêve en disant que tous les jeunes peuvent devenir entrepreneurs : c’est faux. Par contre, ceux qui possèdent cette volonté, on doit pouvoir les accompagner ». Selon lui, diversifier le milieu de la tech passe par travailler sur les facteurs d’isolement géographiques et sociaux en développant des lieux collectifs, des communautés interconnectées…